Burn out version D.-P. Schreber
Daniel Paul Schreber, alors âgé de 42 ans, est nommé à la présidence de la cour d’appel du Land de Dresde le 1 octobre 1893. Ecrasé par une « somme de travail […] singulièrement lourde[1]», il tente de s’étrangler avec une serviette dans la nuit du 21 novembre. Le matin même, il est emmené par le Pr Flechsig en personne à la clinique de Leipzig. Un deuxième internement[2] d’une dizaine d’années pendant lequel, par l’entremise de ses nerfs, D.-P. Schreber devient l’objet supplicié de la volupté de Dieu. « Objet d’horreur d’abord pour le sujet » nous dit Lacan, puis par l’élaboration de son délire, cet état est « accepté comme compromis raisonnable », celui d’être la femme de Dieu. « Dès lors » ajoute-t-il :
« Parti pris irrémissible, et motif futur d’une rédemption intéressant l’univers[3].»
Remarquons que dans la construction délirante de D.-P. Schreber, d’autres protagonistes préexistent à l’action de Dieu, l’âme des ancêtres du Pr Fleschig commanditaire d’ un « Meurtre d’âme[4] » à l’origine du crépuscule de l’univers. En écho à ses voix, D.-P. Schreber refonde la généalogie du Pr Flechsig. Qu’est ce qui le conduit à cette refondation et sur quels éléments s’appuie-t-elle ? A l’instar d’être la femme de Dieu, peut-on également considérer cette généalogie comme une tentative de guérison ? Selon Pr Flechsig, la maladie de son patient serait liée à « une hérédité chargée[5]». En 1911, Freud conclut, en ce qui concerne le Président Schreber, que nous « nous trouvons sur le terrain bien familier du complexe paternel […] si pour le malade le combat avec Fleschig se révèle être un combat avec Dieu, il nous faut traduire celui-ci en conflit infantile avec le père bien aimé[6] ». Pour ses contemporains, il semble que c’est la nature même de ce dont il aurait hérité dans la réalité qui est à l’origine du déclenchement de sa psychose et de son délire. D.-P. Schreber, malade de sa lignée, délirerait-il sur sa propre généalogie et celle des autres ?
A partir des avancées théoriques de Lacan dans la question préliminaire sur les conditions du déclenchement, nous proposerons une autre lecture des incidences de sa transmission; puis à partir de cette lecture préalable nous tenterons de répondre à nos interrogations quant à la genèse et la fonction de la généalogie délirante chez D.-P. Schreber.
D.-P. Schreber et le père de la réalité
Pour Freud, la relation de D.-P. Schreber avec Dieu est identique à celle qu’il entretenait avec son propre père :
« Elle contient la même soumission pleine de vénération et de révolte violente[7].» Ce père en question c’est Daniel Gottlieb Moritz, Médecin célèbre pour ses nombreux ouvrages de pédagogie de la santé et la création des jardins associatifs. Il épouse Pauline Haase et ils auront cinq enfants. Après des études de Médecine, il enseigne, à partir de 1936, à la faculté de médecine de l’université de Leipzig. A la naissance de Daniel-Paul en 1842, il publie : « La Méthode de santé par l’eau froide » suivi, un an après, de « la gymnastique du point vue médicale, présentée en même temps comme une affaire d’état[8] ». La même année il reprend la direction de la Clinique orthopédique d’un certain Dr Carus. La famille y emménage en juin 1847, D.-P. Schreber est alors âgé de cinq ans. En 1851, après un accident[9] dans son gymnase, D.-M.-G. Schreber renonce à toutes ses responsabilités et se consacre alors exclusivement à l’écriture à raison de deux ou trois livres par an. En 1856, il publie un ouvrage qui fera sa notoriété : « Gymnastique de chambre médical et hygiénique » où il considère, dans son introduction, la pratique quotidienne de la gymnastique comme traitement préventif à certaines maladies : « Digestions difficiles ; constipations ; engorgement du foie, de la rate, du système de la veine porte ; céphalalgie concomitante ; hypocondrie et mélancolie[10]». Maladies qui peuvent être évitées par « l’usage mécanique des muscles inférieurs du tronc[11]». Moritz Schreber décède le 10 décembre1861. Sa fille aînée Anna le décrira plus tard comme :
« Un père à la fois d’une sévérité qui ne souffre d’aucune indulgence et d’une bienveillance prête à tous les sacrifices. La croyance des enfants à la véracité inébranlable de leur père leur fait accepter leur obéissance comme une évidence et chacun de ses ordres, même le moindre, est rempli avec la conscience la plus scrupuleuse[12].»
Des ordres qui se concrétisent dans la réalité par une véritable discipline militaire à laquelle aucun de ses enfants ne peut déroger. Chaque jour, gymnastique, natation, temps d’études et promenades afin de préserver « les miracles de la création de Dieu[13]». Le soir, les enfants doivent aussi jardiner et s’occuper du verger. Enfants pour lesquels « tout mensonge, même le mensonge social courant, est sévèrement puni[14]» et qui doivent obéir à des principes moraux bien précis :
« Patience dans tous les domaines, endurance héroïque et maîtrise de soi, sollicitude réciproque et amicale, piété rude et ferme[15].»
Etude préliminaire au déclenchement chez D.-P. Schreber
Freud en conclut que chez D.-P. Schreber :
« La menace du père qui fait le plus peur, celle de la castration, a expressément fourni le matériau à la fantaisie de souhait de transformation en une femme, d’abord combattue et ensuite acceptée[16]. »
D’après la lecture de Freud, les coordonnés du déclenchement de D.-P. Schreber sont repérables dans le lien qu’il entretenait enfant avec son propre père. En 1938, Lacan considère que la famille « établit ainsi entre les générations une continuité psychique dont la causalité est d’ordre mental[17] » et qu’elle « n’objective jamais des instincts, mais toujours des complexes[18] ». Il en conclut que la structure psychique se détermine à partir du complexe d’œdipe freudien à partir duquel, l’imago du père a pour « fonction de répression avec celle de sublimation[19] ». Lacan souligne aussi que la famille « réduite à la mère et à la fratrie » décomplétée de la présence du père est « très favorable à l’éclosion des psychoses[20] ». Le déclenchement de la psychose que Lacan nomme « phase féconde du délire[21] » est corrélatif à l’absence du père de la réalité annulant toute réalisation possible du complexe d’Œdipe. A partir des années 50, la fonction symbolique du père prévaut sur la personnalité de celui-ci :
« Ce n’est pas uniquement de la façon dont la mère s’accommode de la personne du père, qu’il conviendrait de s’occuper, mais du cas qu’elle fait de sa parole, disons le mot, de son autorité, autrement dit de la place qu’elle réserve au Nom-du-Père dans la promotion de la loi[22]. »
En 1958, il formalise le complexe d’Œdipe de Freud par le processus langagier de la métaphore paternelle qui en substituant le signifiant Nom-du-Père au désir de la mère fait advenir la signification phallique. L’entrée dans la psychose n’est plus corrélée à un trop ou pas assez de présence du père de la réalité mais à sa forclusion en tant que signifiant. La forclusion comme « condition essentielle » mais pas suffisante car selon Lacan :
« Pour que la psychose se déclenche il faut que le Nom-du-père, verworfen, forclos, c’est-à-dire jamais venu à la place de l’Autre, y soit appelé en opposition symbolique au sujet[23]. »
Cet appel, pour D.-P. Schreber se produit précisément en juin 1893 avec la notification de sa nomination par le ministre de la justice. Lacan ne dédouane pas non plus le père de la réalité et notamment dans sa capacité à se soumettre à la Loi :
« Les effets ravageants de la figure paternelle [..] dans le cas où le père a réellement la fonction de législateur ou s’en prévaut, qu’il soit en fait de ceux qui font les lois ou qu’il se pose en pilier de la foi, parangon de l’intégrité ou de la dévotion, en vertueux ou en virtuose, en servant d’une œuvre de salut […] qui ne lui offrent que trop d’occasions […] d’exclure le Nom-du-Père de sa position dans le signifiant[24]. »
Il donne pour exemple les œuvres du père de Schreber qu’il rapporte à celles d’un « éducationnaliste, un réformateur social[25] ». Œuvre qui prône, parmi une multitude d’autres thèmes, la droiture morale de l’enfant à partir de sa bonne tenue physique ; un résultat qui peut s’obtenir selon l’auteur par des appareils coercitifs qui corrigent les défauts du corps « encore très souple et mou[26] » de l’enfant (et de ses propres enfants). Car toujours selon M-G. Schreber :
« Bienfait aux enfants dont les éducateurs se font un saint devoir d’écarter soigneusement de la petite plante fragile chaque trace, chaque germe de mauvaise herbe en voie de se montrer[27]. »
Un père pour qui « La question de l’éducation est la question fondamentale de l’existence » ; et qui écrira juste avant sa mort : « l’Ami du foyer comme éducateur et guide… pour les pères et mères du peuple allemand[28] ».
Etude préliminaire à la généalogie délirante du Pr Flechsig
Au début de son internement, D.-P. Schreber oscille entre une grande excitation et des moments de « relâchement profond[29]». Une nuit, il subit nous dit-il, «un nombre en vérité tout à fait inhabituel de pollutions[30]» qu’il ressent comme « un effondrement spirituel[31]». Il s’agit là de son premier raccordement nerveux à l’origine de l’émission de « ses voix intérieures » qui stimulent son propre corps « continument et sans aucun répit[32]». D’abord attribuées à son psychiatre, ces pollutions qu’il nomme par la suite le « parler de nerfs[33]» seraient l’œuvre selon lui de « forces surnaturelles » qui « se signala relativement tôt sous forme de contrainte de jeu de la pensée. […] le principe […] consiste en ceci qu’on force quelqu’un à penser sans relâche[34]». A la Mi-mars 1894, le parler de nerfs au-delà de ce qu’il produit dans son corps lui annonce aussi l’existence d’une « faille[35]» qui s’est produite dans l’univers ; une faille qui se produit pour D.-P. Schreber, après sa nomination, au lieu même du symbolique « au point où » comme nous le dit Lacan :
« Nous verrons comment est appelé le Nom-du-père, peut donc répondre dans l’Autre un pur et simple trou, lequel par la carence de l’effet métaphorique provoquera un trou correspondant à la place de la signification phallique[36].» « Seule forme », précise-t-il encore, « sous laquelle il nous soit possible de concevoir ce dont Schreber nous présente l’aboutissement comme celui d’un dommage qu’il n’est en état de nous dévoiler qu’en partie et où, dit-il avec les noms de Flechsig et de Schreber, le terme de meurtre d’âme joue un rôle essentiel[37]. »
En effet c’est ce meurtre en question qui a produit, d’après ce que lui révèlent quotidiennement ses voix, la faille « aux royaumes divins[38]». Pour D.-P. Schreber c’est d’abord son médecin qui « est désigné comme l’instigateur premier du meurtre d’âme[39] ». Puis avec l’idée que « l’appétit vient en mangeant[40]», il ne suppose non plus un seul meurtre mais plusieurs en lien avec : « une lutte de prestige entre âmes qui avaient déjà quittées l’existence terrestre[41]». Celle de ses ancêtres et de Flechsig, chacune appartenant nous dit-il : « à la plus haute noblesse céleste[42].» Il précise ne pas avoir « la moindre parcelle de connaissance » sur « l’arbre généalogique de la famille Flechsig » ; mais par l’intermédiaire des « communiqués des voix[43]» il retient dans ses mémoires plusieurs noms et notamment celui de : « Daniel Furchtegott Fleschig[44]» qui aurait vécu au XVIII siècle et qu’il désigne cette fois ci comme « instigateur de la première infraction à l’ordre du monde en détournant de son but premier un raccordement divin[45]». Précisément un détournement des nerfs divins de « leur pouvoir créateur[46]» du monde terrestre pour être raccordés aux propres nerfs de D.P. Schreber. Ce qui provoque chez lui une telle nervosité due à l’attraction de toutes les âmes dans son corps qu’il en a la conviction nous dit-il :
« que les liens à Dieu à ma personne avaient entraîné la disparition de toutes les créatures de la surface de la Terre[47]. »
Pour finir D.-P. Schreber en vient à « imaginer[48]» la « conjuration[49] » d’entités d’un royaume divin antérieur liguée « contre la ligné des Schreber sans doute dans l’intention à leur refuser désormais à cette lignée toute postérité ou moins lui refuser le choix de professions qui, telle celle de spécialité des nerfs, aurait pu conduire à des relations plus intimes avec Dieu[50].». A partir de Juin 1894, il perçoit l’avènement « d’une éventuelle résurrection qui alors pourrait intervenir au sein de la création[51] ». D’abord limité aux poissons et mammifères inférieurs, cette résurrection serait celle d’un monde peuplé d’ « hommes nouveaux faits d’esprit Schreber[52] » dont le géniteur[53] ; seul survivant sauvé par Dieu « pour la conservation de l’espèce »[54] et ceci après « avoir obligatoirement subi l’éviration pour mettre au monde des enfants »[55] ; n’est rien d’autre que D.-P. Schreber lui-même. Car nous dit-il :
« l’accomplissement de ce miracle d’éviration je l’ai ressenti par deux fois dans mon propre corps[56]. »
L’appartenance des âmes des Schreber et des Fleschig à la plus haute noblesse céleste ; la conjuration d’un certain Furchtegott Fleschig et de quelques autres pour annihiler la postérité à venir des Schreber ; autant d’ébauches délirantes de D. P Schreber autour d’une renommée de sa lignée qui elle, a bel et bien existé, et qu’il dit connaître « parfaitement[57]». Ceci grâce à un document qu’il lui été transmis : l’arbre généalogique constitué en 1812 par son grand-père paternel, Daniel Gottfried. Ce dernier révèle l’appartenance des Schreber, et ceci dès le XVII siècle, à la grande bourgeoisie de Saxe. Aïeux de D-P. Schreber, qualifiés par son grand-père lui-même « d’imminents lettrés »[58] dont la notoriété sera toujours en référence à Dieu. En effet, Joannes-David Schreber, (Arrière arrière-grand-père de Daniel Paul), était Recteur de l’illustre Ecole de Pforta (couvent cistercien) et auteur en 1688 d’un ouvrage « De Libris obscoenis »[59] où il juge la confession des casuistes romains comme trop portée sur la chose sexuelle. Son fils Daniel Gottfried professeur d’économie à l’Université de Leipzig en 1765, prôna l’enseignement de l’économie dans toutes les écoles « pour le plus grand bien de l’Eglise et des états chrétiens[60]». Son fils cadet qui s’appelle aussi Daniel Gottfried (grand père de Daniel-Paul), exerçait la fonction d’avocat et était connu pour ses crises d’hypocondries. Lacan conclut dans son séminaire :
« Une phénoménologie d’une grande richesse quant aux significations ambiantes dans le contexte d’une bourgeoisie allemande d’assez longue tradition, puisque nous pouvons repérer l’histoire de Schreber à partir du XVIII siècle, ils font partie de la vie intellectuelle de leurs pays d’une façon assez brillante […] les thèmes qui vont surgir dans un second premier temps du délire, sont manifestement liés à cet encerclement culturel […][61] »
Pour exemple le signifiant « Gott » des prénoms de la généalogie de D.-P. Schreber que l’on retrouve dans ceux de sa généalogie délirante et dont les signifiés de Gottfried et Furchtegott peuvent se traduire consécutivement par paix et crainte de Dieu. Il est à noter aussi que plusieurs signifiants de ses phénomènes élémentaires sont aussi déjà présents dans les écrits de son père. « La matière et l’âme sont inséparables[62] » ; « Le corps est la racine de l’arbre de vie spirituel et de l’existence terrestre, il est, le temple d’un être divin[63]» ; « Une action favorable en fortifiant l’irritabilité et en modifiant la surexcitation des nerfs, surexcitation qui agit sur notre disposition d’esprit […] remède souverain ou du moins un auxiliaire indispensable au traitement de la paralysie, de l’affaiblissement ou de l’insensibilité nerveuse, de l’hypocondrie nerveuse, de l’hystérie, des pollutions fréquentes, des maladies mentales[64].»
Pour conclure
En 1909, Sérieux et Capgras définissent l’interprétation délirante comme :
« Un raisonnement faux ayant pour point de départ une sensation réelle, un fait exact, lequel en vertu d’associations liées aux tendances, à l’affectivité, prend, à l’aide d’inductions ou de déductions erronées, une signification personnelle pour le malade, invinciblement poussé à tout rapporter à lui[65]. »
Le fait exact ici est que Schreber père et fils sont les descendants d’une lignée d’érudits ; transmission d’une charge, dont on peut déduire avec la formalisation de la forclusion du nom du père, qu’elle n’est pas la cause du déclenchement de D.-P. Schreber mais qu’elle participe cependant, par ses signifiants d’imminents lettrés et de Gott, à la thématique de son délire. A. Tabouret-Keller apporte une distinction, dans la transmission de D. P Schreber, entre celle du désir de réformes de ses ancêtres de l’incarnation même de celle-ci dans les écrits de son père : « Il est la réforme. Ses proches, sa femme, ses enfants, ses disciples n’en doutent pas. Dans sa famille tout comme dans sa clinique, ce qu’il dit est pris à la lettre, son discours fait loi[66]. »
En effet les signifiants des écrits de Moritz Schreber, princeps éducatifs universel qui forclos le signifiant du Nom du Père dans le désir de la mère, font retour à travers les hallucinations de D.-P. Schreber ; « Signifiant […] déchaîné dans le Réel[67] » dira Lacan qui le concerne personnellement et qui le conduit non à un raisonnement faux mais à une réponse logique, celle de la métaphore délirante ; selon Lacan de « même force structurante[68] » que le phénomène élémentaire. Ainsi son idée qui lui est « si étrangère[69] » « qu’il serait beau d’être une femme subissant l’accouplement»[70] aboutie quelques années plus tard à une signification qui selon Lacan « « reste irréductible[71] », celle d’être la femme de Dieu. Entre temps, une autre énigme s’impose à D.-P. Schreber celle du meurtre d’âme à l’origine du crépuscule des hommes qu’il résout cette fois ci par la refondation délirante de la généalogie des Flechsig comme essai de restitution du sens, et par le miracle de l’éviration divine comme solution à ce crépuscule.
« L’éviration était, que je le veuille ou non, un impératif absolu à l’ordre de l’univers et à la recherche d’un compromis raisonnable, il ne me restait plus qu’à me faire à cette idée d’être transformé en femme. L’éviration devait naturellement avoir pour suite rien moins que ma fécondation par les rayons divins, en vue de la génération d’une nouvelle race d’hommes[72]. »
Dans la question préliminaire, comme le note Colette Soler, Lacan ne met pas la dimension pulsionnelle (Réel) au premier plan. La problématique se situe surtout au niveau du Symbolique et de l’Imaginaire. A partir de 1966, Lacan, rappel encore C. Soler, définit le Dieu de Schreber comme « le Dieu mort du signifiant qui l’absorbe comme son objet de jouissance. Schreber est l’objet vivant dont veut jouir Dieu »[73]. Avec ce texte, Lacan donne une « définition plus précise de la paranoïa comme identifiant la jouissance dans ce lieu de l’Autre comme tel »[74].
Généalogie et éviration délirante qui s’articulent donc comme une seule et même « tentative de guérison[75] » quant à l’effraction de la jouissance de l’Autre sur le corps de D.-P. Schreber. Deux interprétations délirantes qui permettent à D.-P. Schreber d’identifier la jouissance au champs de l’Autre. L’aboutissement final de devenir la femme qui manque à Dieu, signe, lui, le compromis raisonnable, avec cette jouissance. Après sa sortie de l’asile en 1902, il semble que D.-P. Schreber s’émancipe quelque peu des signifiés de son père :
« Tout effort pour tenter d’exercer ailleurs une action éducative doit être abandonné comme voué à l’échec, et chaque jour qui passe depuis cette époque m’a confirmé l’exactitude de cette façon de voir[76]. »
[1] SCHREBER, D. P. Mémoires d’un névropathe, Paris, Ed. Du Seuil,1975, p.64.
[2] Deuxième internement qui fait suite après une courte hospitalisation pour crise d’hypocondrie, un mois après l’échec de son élection au Reichstag le 28 octobre 1884.
[3] LACAN, J., « La question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », Ecrit II, Ed du Seuil, 1999, p.42.
[4] SCHREBER, D. P. Mémoires d’un névropathe, Op.cit., p.47.
[5] [http://psycha.ru/fr/schreber/1903/memoire_d_un_nevropathe43.html]. Baumeyer a donné au Congrès de psychanalyse de Berlin, en 1951, une relation détaillée de cette hospitalisation.
[6] FREUD, S., Le président Schreber, Paris : P.U.R, 3ième édition, 2011, p.54.
[7] Ibid. p.50.
[8] THIS. B., [http://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/06_n-13-groupe-de-travail-sur-les-psychoses-vendredi-02-11-73-am-1-1.pdf] p.54.
[9] Il reçoit une lourde échelle en fer sur la tête.
[10] SCHREBER, M., « Système de gymnastique de chambre médicale et hygiénique », Paris, Ed librairies Victor Masson, 1956, in Ed Maxtor, 2011, p.9.
[11] Ibidem.
[12] Tabouret-Keller, A. « Une étude : la remarquable famille Schreber », Scilicet, n° 4, Paris, 1973, p.292.
[13] Ibidem.
[14] Ibidem.
[15] Ibidem.
[16] FREUD, S., Le président Schreber, op.cit., p.54.
[17] LACAN, J., « Les complexes familiaux », Autres Ecrit, Paris, Seuil, 2001, p.25.
[18] Ibid., p.27.
[19] Ibid., p.56.
[20] Ibidem.
[21] Ibid., p.63.
[22] LACAN, J., « La question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », Ecrit II, op.cit., p.57.
[23] Ibid., p.55.
[24] Ibid., p.57.
[25] Ibid., p.59.
[26] Tabouret-Keller, A. « Une étude : la remarquable famille Schreber », op.cit., p.298.
[27] Ibidem.
[28] [http://psycha.ru/fr/schreber/1903/memoire_d_un_nevropathe43.html]
[29] Schreber D. P. Mémoires d’un névropathe, op.cit., p.70.
[30] Ibid., p.72.
[31] Ibidem.
[32] Ibid., p.74.
[33] Ibid., p.73.
[34] Ibidem.
[35] Ibid., p.47.
[36] LACAN, J., « La question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », Ecrit II, op.cit., p.36.
[37] Ibidem.
[38] Schreber D. P. Mémoires d’un névropathe, op.cit., p.48.
[39] Ibidem.
[40] Ibidem.
[41] Ibid., p.49.
[42] Ibidem.
[43] Ibidem.
[44] Ibidem.
[45] Ibidem.
[46] Ibid., p.33.
[47] Ibid., p.56.
[48] Ibid., p.52.
[49] Ibidem.
[50] Ibidem.
[51] Ibid., p.144.
[52] Ibidem.
[53] Désigné initialement sous le nom de « juif errant éternel ».
[54] Ibid., p.80.
[55] Ibid., p.81.
[56] Ibid., p.81. Miracle attribué au rayons dit « divins inférieurs d’Ahriman » complémentaire « des rayons du Dieu supérieur Ormuzd ont la faculté, le cas échéant, de régénérer la virilité ».
[57] Ibid., p.101.
[58] [http://psychanalyse-paris.com/Moritz-Schreber.html]
[59] Tabouret-Keller, A. « Une étude : la remarquable famille Schreber », op.cit., p.288.
[60] Ibid., p.289.
[61] Lacan J., Le séminaire Livre III, Les psychoses, 1955- 1956, Paris : le Seuil, 1981, p.239.
[62] Tabouret-Keller, A. « Une étude : la remarquable famille Schreber », op.cit., p.299.
[63] Ibid., p.296.
[64] Schreber, M., « « Système de gymnastique de chambre médicale et hygiénique », op.cit., p.10.
[65] BREMAUD. N., « Un historique des définitions du délire psychotique », l’évolution psychiatrie : 2013, Paris, Ed. Elsevier Masson, p.190.
[66] Tabouret-Keller, A., « Une étude : la remarquable famille Schreber », op.cit., p.301.
[67] LACAN, J., « La question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », op.cit., p.61.
[68] LACAN J., Le séminaire Livre III, Les psychoses, op.cit., p.28.
[69] SCHREBER, D. P., Mémoires d’un névropathe, op.cit., p.63.
[70] Ibid., p.64.
[71] LACAN J., Le séminaire Livre III, Les psychoses, op.cit., p.43.
[72] SCHREBER, D. P., Mémoires d’un névropathe, op.cit., p.208.
[73] SOLER, C., L’inconscient à ciel ouvert, Presse Université du Mirail, 2002, p.205.
[74] LACAN, J., « Présentation des Mémoires d’un névropathe », 1966, Autres Ecrits, Seuils, p.215.
[75] FREUD, S., Le président Schreber, op.cit., p.70.
[76] SCHREBER, D. P., Mémoires d’un névropathe, op.cit., p.219.