Texte de l’intervention au Collège de Clinique Psychanalytique de l’Ouest, à Rennes le 21 septembre 2019.
« Le symptôme institue l’ordre dont s’avère notre politique[1] »
L’empire de la science et l’extension politique de son discours ne cessent d’annoncer les progrès du progrès qui réduisent les symptômes du manque-à-être et de la douleur d’exister, à de simples signes de dérangement de l’ordre d’une civilisation – troubles- desorders, que le DSM énumère, et où le tout un chacun s’épingle volontiers. Civilisation qui fait tout par ailleurs pour éradiquer les étrangetés qui hantent les lumières de la cité, pour y maintenir son ordre et ne pas perdre la morale.
Pouvons-nous ne pas nous laisser intimider, puisque pour nous il est clair que notre éthique, la praxis de la théorie, ne collabore pas avec ce type de progrès ? En effet, le savoir du psychanalyste est un savoir « qui n’en peut mais, le savoir de l’impuissance voilà ce que le psychanalyste, dans une certaine perspective, une perspective que je ne qualifierai pas de progressive, voilà ce que le psychanalyste pourrait véhiculer[2] » affirme Lacan dans les conférences dénommées Le Savoir du Psychanalyste. Ne nous laissons pas intimider, au contraire, que cela rende plus urgente encore notre responsabilité éthique rappelée encore une fois par Lacan dans sa Conférence à Genève sur le symptôme : « Il ne serait peut-être pas mal que l’analyste donne un certain témoignage qu’il sait ce qu’il fait[3] ». Un faire branché sur un certain savoir. Un savoir-faire qui tienne compte du Réel.
Or, s’il est quelque chose dont nous pouvons et devons témoigner en ces temps de « furor sanandi », c’est de notre opération-symptôme, notre opération sur le symptôme, avec le symptôme, pour le symptôme. En effet, dès le principe de notre expérience, le symptôme se présente comme constituant l’opération propre de la psychanalyse et articule son procès du début à la fin. C’est cela l’évènement Freud, « le saut de l’opération freudienne – remarque Lacan. Elle se distingue d’articuler en clair le statut du symptôme avec le sien, car elle est l’opération propre du symptôme, dans ses deux sens[4] » sur le symptôme, avec le symptôme.
Il ne s’agit pas d’une déclaration de guerre contre le discours capitaliste, mais c’est une partie très serrée qui se joue ici, où stratégie, tactique et politique[5] contribuent à restituer au symptôme sa portée politique, son effet révolutionnaire : « Pas de différence une fois le procès engagé entre le sujet qui se voue à la subversion jusqu’à produire l’incurable où l’acte trouve sa fin propre, et ce qui du symptôme prend effet révolutionnaire[6] ».
La révolution du symptôme, c’est qu’il se trouve au début de l’analyse et se retrouve à la fin comme le remarque justement Sidi Askofaré dans son texte La révolution du symptôme. Mais l’opération propre du symptôme, où il « prend effet révolutionnaire » est surtout quand sa dissidence, qui trouble l’ordre du sujet et de ses identifications, prend valeur de trace effacée de l’identité en souffrance, jusqu’à se précipiter comme ce qui « n’homme » cette identité de « séparation » : « note propre de la dimension humaine[7] » de chaque un. Il s’agit de la dissidence du tout mais pas ça qui fait retentir le point originel de l’émergence du dire, son insurrection fondamentale : « le mais pas ça, c’est ce que j’introduis sous mon titre de cette année comme le sinthome[8] ».
Déjà en 1966, Lacan[9] avertissait du parcours révolutionnaire de cette opération symptôme que le nœud borroméen allait finalement lui permettre d’écrire : « Car la fidélité à l’enveloppe formelle du symptôme, qui est la vraie trace clinique dont nous prenions le goût, nous mena à cette limite où elle se rebrousse en effets de création. »
Du début à la fin d’une analyse, ce qui vectorise la cure, la direction de son procès (logique) et de son expérience (qui inclut le Réel) c’est une opération symptôme, en trois actes. Déplier ces trois actes dans la scène psychanalytique produit un traitement du rapport entre l’universel de la castration et le singulier de la solution d’ex-sistence.
Le symptôme est le nom de cette marque de l’inconciliable (unverträglich) qui trouve une solution de compromis en se faisant remarquer comme insupportable (unerträglich) et incluant ainsi l’autre à qui on se plaint, ce qui le rend analysable. Le sinthome est le nom de cet incurable de la structure : la séparation inaugurale du sujet (réponse du réel) pas-tout aliéné à l’identification à l’Autre et à ses semblants.
Cette opération révolutionnaire, de symptôme à sinthome dépend de son opérateur, c’est à dire l’acte, le désir, le discours, soit, la fonction de l’analyste que Lacan, aussi bien nommera « symptôme » : « Le psychanalyste assurément dirige la cure », avertit Lacan dans le texte de 1958, et il explique : « une direction de la cure qui s’ordonne… selon un procès qui va de la rectification des rapports du sujet avec le réel, au développement du transfert, puis à l’interprétation[10] ». Le psychanalyste sinthome dirige la cure en le complétant par la supposition de savoir qu’il supporte et en le décomplétant par l’acte qu’il porte.
Procès en trois temps, que l’on peut ordonner comme trois temps logiques d’opération sur le Réel du symptôme, qui part de la plainte sur son absence de sens, progresse avec l’exploration de son sens supposé jusqu’à l’extraction de sa lettre – le chiffre dépourvu de sens – point originel des élucubrations de la névrose et des tours et détours de l’association libre.
Instant de voir : l’entrée en analyse – un symptôme « idiot » prend le risque de s’assujettir à un lien, à partir d’une hypothèse, supposition, subversion du sujet, transformant le symptôme objecteur en signifiant du transfert, qui se met à représenter le sujet : « rectification des relations du sujet avec le Réel ».
Temps pour comprendre : « se vouer à la subversion jusqu’à produire l’incurable ». Les déploiements de la voie du sujet supposé savoir, ainsi déclenchée, explorent le sens du symptôme dans l’expérience de la névrose de transfert. Temps pour comprendre ce qui par principe ne se comprend pas, il en résultera une double extraction de l’incompréhensible.
Moment de conclure : l’interprétation est, depuis Freud, le principe opérateur sur le symptôme, opérateur de la politique de la fin de l’analyse, en tant qu’elle est « preste pour satisfaire à l’entreprêt. De ce qui perdure de perte pure…[11] » : L’interprétation conduit à la séparation.
Opération symptôme – Acte 1
Il s’agit ici du « passage d’une politique de l’autruche à une politique qui s’oriente par l’inconscient[12] » ou du passage du symptôme comme dérangement à un arrangement du symptôme reconnu comme tel. Avant le début d’une analyse les symptômes sont des manifestations folles, discordantes, inadéquates, politiquement incorrectes, inavouables, hors-sens qui gênent le sens de la vie et le sens commun. Ils encombrent, perturbent, désolent le corps, la pensée et toutes leurs dérivations dans les choses de la vie (mère, père, mari, chef, argent, fouillis de la maison, manque de chance, de temps, d’enfant, de partenaire, de sexe, trop d’enfants, de sexe etc.. : « Les symptômes… sont des actes nuisibles ou tout au moins inutiles, des actes qu’on accomplit avec aversion et qui sont accompagnés d’un sentiment pénible ou de souffrance[13]. »
A l’entrée en analyse, l’inconciliable dépourvu de sens du symptôme devenu insupportable fait question et fait lien : il inclut l’analyste. Le « saut de l’opération freudienne », son audace, doit être reproduite à chaque entrée d’analyse. C’est un saut qui subvertit le mal-être, qui de dérangement, « étrangèreté » lourde et encombrante, se transforme en question sur le sujet via une supposition de sens qui rapidement donne accès à une certaine légèreté. Ainsi la forme externe « le mode de manifestation du contenu de chaque symptôme » permet l’accès au « noyau le plus caché… et nous révèle en même temps une partie non négligeable du mystère de la névrose[14] ».
« Il y a pas de doute », dit simplement Lacan en 1975 « quiconque vient nous présenter un symptôme y croit. Qu’est-ce que ça veut dire ? S’il nous demande notre aide, notre secours, c’est parce qu’il croit que le symptôme, il est capable de dire quelque chose, qu’il faut seulement le déchiffrer[15] ». La croyance dans le symptôme est le premier pas de l’entrée en analyse.
Les premières entrevues avec un analyste sont toujours impactantes, tendues par une inquiétude pressante, mais encore indécise ; il y a là en suspens quelque chose d’inconciliable, quelque chose d’unique. Sur les lignes des chaînes signifiantes qui se déroulent devant nous, mais surtout entre les lignes, quelque chose plane qui actualise de diverses manières une division, une discordance entre énonciation et énoncé indiquant de « l’individuel », écho singulier du « il n’y a pas » ; il y a un dire qui transparaît par l’intermédiaire d’une certaine opacité subjective. Quelque chose se présentifie dans l’affect et dans la voix – qu’elle soit blasée, réticente, tonitruante ou hésitante – quelque chose qui cherche à dire, transformant l’angoisse en énoncés qui, déjà incluent l’analyste et le savoir qu’il est supposé détenir sur l’énigme de son désir « qu’est que ça veut ? ».
Accuser réception de cette énonciation informulable c’est l’entrée de l’analyste, qui inaugure les deux versants du transfert : d’une part la supposition d’un savoir sur l’énigme du sujet ainsi représenté et se présentant dans cette déclamation/réclamation, et d’autre part la fonction de l’objet, c’est à dire, de quelque chose là déjà qui ne se subjective pas, ni ne se comprend, mais qui se pose, se met en cause. Transformer la plainte en symptôme analytique/ analysable, où le sujet sera en question et dépliera sa démonstration, ne se produira pas si l’analyste d’entrée de jeu, ne prend pas en considération cette monstration singulière de l’inconciliable, « l’essence de la théorie psychanalytique est un discours sans parole[16] ». L’analyste, dès le début, ne se présente pas comme complice du sens, mais comme partenaire de son énigme fondamentale. Le paradoxe de l’acte de l’analyste est déjà en fonction, d’un côté, en silence, il accueille ce « Qu’on dise[17] » « insondable décision de l’être[18] », l’inconciliable singulier point de départ de l’énonciation, mais d’autre part, attentif, conciliant, il lâche la bride des énoncés vectorisés par le sujet supposé savoir.
Opération symptôme – Acte 2 : les tours de la vérité
Si c’est par une irruption de non-sens que la psychanalyse commence, c’est comme une pratique de sens qu’elle continue : à s’accrocher à l’énigme présentée par l’analyste (son désir), le non sens fait lien et fait chaîne. La présence de l’analyste, sa position, « position de l’inconscient », mise en place du savoir comme inconscient, déclenche l’association libre où le sens se déchaîne à l’adresse d’un « partenaire qui a chance de répondre[19] », pour que ce chemin débouche sur le « mieux qui se puisse attendre d’une analyse à la fin[20] » et non au pire.
Cette pratique du sens – du sens symbolique au sens réel – part du non-sens du symptôme, se déplie dans les divers sens des symptômes que le transfert supporte pour, à la fin des tours dits déduire le hors sens primordial de sa contingente « corpsubstance » originaire, la lettre d’un dire.
Cette pratique – temps pour comprendre – confère d’entrée au falsus du symptôme une valeur de vérité : « qui représente le retour de la vérité comme tel dans la faille d’un savoir[21] ». A partir de là, alors que la stratégie névrotique s’oriente sur le vecteur de La vérité, la direction de l’analyse va résulter en trois dimensions de la vérité, qui sera démontée à l’épreuve du transfert.
1 – En direction de la vérité menteuse
Le travail de construction de ce temps pour comprendre, procède par les voies poétiques de la métaphore et de la métonymie, travail captivant qui octroie à celui qui en est le patient, toutes les séductions possibles au point de se transformer en une tache interminable (un partenaire patient, condescendant, qui permet de se sauver de l’idiotie du symptôme en bonne compagnie !).
Le travail de l’association libre (pas sans l’analyste) continue, dans la poursuite de la vérité occulte du symptôme, dans un travail ardu de déchiffrage qui au lieu de compléter la vérité avec le savoir, la décomplète avec un savoir insu, qui la dé-couvrira peu à peu comme pas-toute. Plus on avance, plus elle se décomplète, se contredit, s’équivoque, se révèle, certes, mais comme élucubration, à déchiffrer le sens du symptôme, c’est son chiffre qui retentit. Ces fictions de vérité sont construites peu à peu, jusqu’à ce que l’on se rende à l’évidence de son inconsistance d’une part, et d’autre part, de la constance fantasmatique qui plombe cette vérité menteuse.
Ce temps pour comprendre, de constructions en déconstructions, assure des effets thérapeutiques certains, à force de déranger, de déconcerter, de « fragmenter[22] » le symptôme, cristallisé comme destin de la névrose. Mais la construction du fantasme n’est pas le tout de ce qui s’éprouve dans ce temps de l’expérience où tangentiellement on se détache du sens, on s’en desserre, on le lâche, comme on lâche du lest.
2 – En direction de la vérité de la structure : le Réel impossible
« La psychanalyse, qu’est-ce ? » – demande Lacan une fois de plus en 1972 – « C’est le repérage de ce qui se comprend d’obscurci, qui s’obscurcit en compréhension, du fait d’un signifiant qui a marqué un point du corps corps[23]. » Les élucubrations – ce qui se comprend d’obscurci – relèvent d’un fait d’origine « un signifiant qui a marqué le corps[24]. »
Comment se produit ce repérage du point d’origine du symptôme, « hors-la-loi » du sens, dans les cours et décours de l’association libre, qui est en principe, une pratique de parole orientée par la vérité et à la recherche du sens perdu coûte que coûte ?
Dans Le Savoir du Psychanalyste, Lacan annonce deux horizons du signifiant : le matériel/maternel d’un côté, et de l’autre le mathématique. Il convient de rappeler à l’occasion que l’horizon est par définition ce à quoi l’on n’accède pas, mais qui détermine une direction. Ces deux horizons déterminent la direction de la cure et le traitement analytique du symptôme : le réel comme impossible et le réel comme ex-sistence.
L’horizon mathématique du signifiant oriente la voie logique de la psychanalyse, la voie de la démonstration de la vérité de la structure : il n’y a pas de rapport sexuel. Le vecteur mathématique du signifiant est le vecteur qui réduit l’articulation signifiante (S1- S2)[25] à la paire ordonnée de la théorie des ensembles : < S1, S2 >, et la série des dits à une série infinie de +1+1+1…
(S1→ S2) = (S1(S1(S1(S1→ S2)
La supposition qu’un signifiant représente un sujet pour un autre signifiant se réduit, à la fin, à une série de Uns répétitifs, dont l’horizon est un savoir S2, inaccessible à la série des Uns toujours et encore hors d’atteinte du signifiant, en-corps. Dans cette perspective (logique), la voie de l’association libre démontre une profonde insuffisance logique (inaccessibilité du 2), mais permet de toucher tangentiellement cette vérité universelle du « Il n’y a pas de rapport sexuel », incurable vérité propre à chacun des cas particuliers de cette loi universelle. L’indécidable conséquent de l’insuffisance logique du vecteur mathématique de l’expérience de l’association libre indique le fait qu’il n’y a pas de conclusion logique pour une analyse, il y a une décision : que ce soit par l’issue d’une solution singulière validée comme « ticket de sortie » de l’analyse ou au contraire par la réaction thérapeutique négative[26], ou par l’infinitisation de la pratique du sens. Option éthique donc, avec des conséquences et des suites politiques.
3 – En direction de la vérité du Y a d’l’Un – ex-sistence réelle
L’horizon matériel et maternel du signifiant rompt la logique du signifiant qui représente le sujet pour un autre signifiant etc. Au lieu d’indiquer et démontrer ce qu’il n’y a pas, cette voie permet de montrer ce qu’il y a : il y a de l’Un, mais il faudra y mettre la voix.
La supposition de sens bute sur une limite et sur le réel comme impossible, l’immixtion du mal entendu dans la direction de la cure permet que le réel soit pris de surprise : prendre par la tangente le réel qui existe au parlêtre, au réel du vivant, de l’un vif, hors sens. « Dès que nous parlons, c’est un fait que nous supposons quelque chose à ce qui se parle… C’est seulement au fait de parler que … puisse s’apercevoir que ce qui parle, est ce qui jouit de soi comme corps[27]. »
La pratique du sens de l’association libre produit ce sens réel, soit la direction qui vient du réel et qui a des effets manifestes, patents, pas latents, à la surface de lalangue, effets plus « poématiques[28] » que poétiques, où le Y a d’l’Un apparaît, « par-est[29] », il se montre dans les lapsus, les malentendus, équivoques, (condensations, collapsus du son et du sens), il se montre toujours, si on y prête oreille, dans le glissement constant du son au sens et retour.
Au-delà de la raison de la série que la chaîne associative permet d’extraire en cernant le non rapport sexuel, celle-ci permet aussi fondamentalement que résonne le Y a d’l’Un de lalangue dans les trébuchements du sens. Une voie ne va pas sans l’autre : en produisant la raison du Un, ce qui est ciblé, c’est l’ensemble vide que l’on peut alors nommer comme Un, produisant le creux[30], où sonne l’écho d’une autre « réson[31] ». « C’est à ce joint au réel, que se trouve l’incidence politique où le psychanalyste aurait sa place s’il en était capable[32]. »
Opération Symptôme – Acte 3
Suivant l’indication de Lacan de 1958, je nomme « interprétation » l’acte qui conditionne la fin de l’analyse, En effet, depuis le début, et dans les divers moments de l’analyse, c’est la tactique de l’interprétation, dans sa dimension fondamentale de coupure, qui conduit jusqu’à sa fin. Que ce soit se présentant comme désir énigmatique, déconcertant la fiction fantasmatique, révélant les apories de l’association libre, faisant résonner et retentir le malentendu fondamental de lalangue, l’interprétation défait le sens des symptômes ; ces tactiques suivent une même politique : la production de la fin de la supposition du sens dans l’Autre signifiant, la séparation, dimension éminemment politique de l’opération symptôme. « Identité de séparation » selon l’expression de Colette Soler[33]. Le moment de conclure n’est pas une conclusion, mais une décision. « Le tableau, me met dehors » dit l’artiste. Quand l’analysant est suffisamment poème, il se détache, se distingue, et d’autiste (son symptôme idiot) il se fait artiste: sin- home, c’est-à-dire, sin + l’hom ; c’est dire, Sin, le péché originel, soit Il n’y a pas… et son supplément : LOM[34]. C’est dire qu’à l’origine, au point de départ, de partition d’une jouissance perdue : Y a d’ l’Un. Cela peut quelque fois nous faire déclarer dans le dispositif de la passe : Ça, c’est quelqu’un ! [35] « This is somebody ! » dirions-nous en anglais, ce qui y fait entendre la part du corps qui soutient cette présence remarquable.
Pour ne pas dire que je n’ai pas évoqué la clinique, je vais donner un exemple extrait d’une musique enfantine française bien connue :
« Tout en passant par un petit bois, tout en passant par un petit bois. Tous les coucous chantaient. Tous les coucous chantaient. Et dans leur joli chant disaient : coucou, coucou, coucou, coucou. Et moi, je croyais qu’ils disaient : Coupe-lui le cou, coupe lui le cou. Et moi je m’en coure, coure, coure. Et moi je m’en courais. Et moi je m’en coure, coure, coure. Et moi je m’en courais toujours. »
« Coupe-lui le cou, coupe-lui le cou », c’est une élucubration de langage, « moi, je croyais qu’ils disaient » à partir de lalangue : « coucou, coucou, coucou ». Rencontre contingente : « Tout en passant par un petit bois. Tous les coucous chantaient », mais qui a de sérieuses conséquences de symptôme : « Et moi je m’en coure, coure, coure. Et moi je m’en courais toujours ». Le sujet peut dans une analyse trouver qu’il a mieux à faire de sa vie au lieu de passer son temps à courir après l’autre/loin de l’autre. Opération symptôme : une psychanalyse peut occasionner une rencontre (contingence) avec un savoir-faire différent avec cette répétition de la marque signifiante hors sens.
[1] LACAN J., « Lituraterre », dans Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p.18.
[2] LACAN J., Le Séminaire Livre XIX, Le savoir du Psychanalyste, inédit, leçon du 4/11/1971.
[3] LACAN J., Conférence à Genève sur le symptôme, inédit.
[4] LACAN J., « Du sujet enfin en question », dans Écrits, Paris, Seuil, 1966, p.234.
[5] FINGERMANN D., « Estratégia da transferência, tática do ato, política do fim », Revista Textura, nº 8, São Paulo, DMM Gráfica, 2009, p.21.
[6] LACAN J., « Résumé du séminaire L’acte psychanalytique », dans Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p.381.
[7] LACAN J., « Conférences et entretiens dans les Universités américaines », dans Scilicet, 6/7, Paris, Seuil, p.56.
[8] LACAN J., Le Séminaire Livre XXIII, Le Sinthome, Paris, Seuil, 2005, p.14.
[9] LACAN J., « De nos antécédents », dans Écrits, op.cit., p.66.
[10] LACAN J., « La direction de la cure et les principes de son pouvoir », dans Écrits, op.cit., p.598.
[11] LACAN J., « Télévision », dans Autres écrits, op.cit., p.545.
[12] GUITART-PONT R., Le Mensuel.
[13] FREUD S., « Conférence XVII – Le sens des symptômes », dans Introduction à la psychanalyse, Paris, Payot, 1987.
[14] Ibid., p.245.
[15] LACAN J., Le Séminaire Livre XXI, R.S.I., inédit, leçon du 21/01/1975.
[16] LACAN J., Le Séminaire Livre XVI, D’un Autre à l’autre, Paris, Seuil, 2006, p.11.
[17] LACAN J., « L’étourdit », dans Autres écrits, op.cit., p.449.
[18] LACAN J., « Propos sur la causalité psychique », dans Écrits, op.cit., p.177.
[19] LACAN J., « Introduction à l’édition allemande des Écrits », dans Autres écrits, op.cit., p.558.
[20] LACAN J., « Lituraterre », op.cit., p.11.
[21] LACAN J., « Du sujet enfin en question », op.cit., p.234.
[22] SOLER C., Le symptôme et l’analyste, Paris, Trèfle Communication, 2005.
[23] LACAN J., Le Séminaire Livre XIX, Ou pire…, leçon du 4/05/1972.
[24] Idem.
[25] LACAN J., Le Séminaire Livre XVI, D’un Autre à l’autre, op.cit. Lacan explore les propriétés du concept de la théorie des ensembles de la « paire ordonnée » pour aller au-delà de la simple articulation signifiant S1 – S2, et reprend ce développement dans le Séminaire Livre XX, Encore, p.130.
[26] FINGERMANN D., « Avatares da Eficácia da Psicanálise : a Reação Terapêutica Negativa », Avatares do supereu, Salvador, Campo Psicanalítico, 2008.
[27] LACAN J., Le Séminaire Livre XIX, Ou pire…, op.cit., leçon du 04/05/1972.
[28] SOLER C., L’en-corps du sujet, Paris, Trèfle Communication, 2003.
[29] LACAN J., Le Séminaire Livre XX, Encore, Paris, Seuil, 1975, p.44.
[30] VALERY P., « Le cimetière marin », La bibliothèque de poésie, III, Paris, Éditions France Loisirs, 2004, p.803. « Entre le vide et l’évènement pur J’attends l’écho de ma grandeur interne. Amère sombre et sonore citerne Sonnant dans l’âme un creux toujours futur. »
[31] PONGE F., Pour un Malherbe, Paris, Gallimard, 1965, p.57.
[32] LACAN J., « Radiophonie », dans Autres écrits, op.cit., p.443.
[33] SOLER C., L’inconscient réinventé, Paris, PUF, 2009.
[34] LACAN J., « Joyce, le Symptôme », dans Autres écrits, op.cit., p.566.
[35] LACAN J., « Radiophonie », op.cit., p.415.