Je pars de la question suivante : pourquoi la passe dans une Ecole de psychanalyse ? Sur ce sujet, il est d’abord nécessaire d’isoler à quoi est venue répondre cette proposition de Lacan. Voilà qui nous reconduit dès lors à questionner les rapports d’une Ecole de psychanalyse, à la formation des psychanalystes. Il y a sur ce point une première référence de Lacan particulièrement intéressante, son texte « Situation de la psychanalyse et formation du psychanalyste en 1956[1]« , qui aurait bien besoin aujourd’hui de son actualisation : « Situation de la psychanalyse et formation du psychanalyste en 2018 ». J’en relèverai ici plusieurs points, lesquels nous permettront de questionner peu à peu l’articulation entre la passe et la formation dans une Ecole de psychanalyse.
Dans ce texte, Lacan critique en effet l’organisation de l’I.P.A. (International Psychoanalytical Association), mais sur un mode particulier, et qui est le ton d’une fable. Lacan aura en effet souvent insisté sur les vertus des moralistes, dont La Fontaine et La Rochefoucault, qui aux travers de leurs fables et maximes, savaient faire passer loin de toute morale, les paradoxes et leçons du désir lui-même. Pour cette raison, je proposerais alors volontiers de rebaptiser ce texte de Lacan « Suffisance et Petits Souliers ». En effet, Lacan y commente tout d’abord l’organisation hiérarchique de l’I.P.A., où prévaut une logique d’identification du moi de chaque individu à une image idéalisée, incarnée par un chef, « une même image idéale, dont la personnalité du chef supporte le mirage[2]« . A cette figure, Lacan donne alors le nom de Suffisance, non pas comme attribut mais comme nom propre, tous les grades existant dans cette institution se laissant résumer à cette position d’infatuation. « C’est pourquoi nous donnerons le nom de Suffisance au grade, au grade unique de la hiérarchie psychanalytique ». Enfin, la Suffisance sera ainsi définie : ce qui « n’a à suffire à rien, puisqu’elle se suffit ». La Suffisance n’est donc pas une identification constituée au regard d’un idéal, d’une visée, d’un acte à venir, voire d’une éthique. Elle est une identification de soi à soi. Il n’y a pas de « Suffisance moindre ou plus grande, on suffit ou on ne suffit pas[3]« .
Face à ces Suffisances de la hiérarchie, Lacan isole alors une autre catégorie. Il s’agit des Petits Souliers. L’expression devra elle-aussi porter ses majuscules, devenant comme une sorte d’identification type, une geste, dont les courbettes obséquieuses d’un Louis de Funès auprès de son aimable seigneur pourraient bien nous donner une idée. Et pourquoi ceux-là seront-ils en effet dans leurs petits souliers, sinon qu’ils tâcheront ainsi de ne pas trop ébruiter l’intention secrète et honteuse qui est la leur, accéder un jour au rang de Suffisance. « Ils sont toujours dans leurs petits souliers, précise Lacan, (et) manifestent une suffisance voilée de son opposition à la Suffisance[4]« . Dans une telle institution, nous aurons ainsi: les tenant des positions hiérarchiques, les Suffisances, et ceux qui s’identifient à elles, les Petits Souliers. Louis de Funès dans la peau d’un Iznogoud rêvant de devenir Calife à la place du Calife.
Vient alors la question : qu’est-ce qu’une telle répartition produit dans une école de psychanalyse ? Entre les Suffisances et les Petits Souliers, qu’y aura t’il ? Un comble. A savoir que, là où une institution psychanalytique aurait pour devoir de maintenir un certain discours, celui-là même que Freud aura inventé et dont il aura fondé la pratique, il y aura alors en lieu et place, dit Lacan : le silence.
« Que pourraient dire en effet les Petits Souliers ?, poursuit-il. Poser des questions ?[5] » Ils n’en font rien. Ici, le silence règne en maître, et pour au moins deux raisons. Premièrement, un bon analysé (et non un analysant) ne pose pas de questions, puisqu’il est bien formé, rassuré et abrité derrière son infatuation, son identification imaginaire à ce qui était alors promu au rang d’image idéale: un moi fort. D’autre part, il est impossible dans une telle communauté de poser une question. Il faudrait pour cela, précise Lacan, « le culot monstre de l’enfant pour dire que le Roi est nu, pour en faire la remarque[6]« . Pour oser poser une vraie question, il faudrait partir du fait qu’il n’y a pas d’Autre de l’Autre. De même que, il faudrait que cet Autre sache son incomplétude, pour s’intéresser aux questions des petits autres, autant que pour avoir le désir de parler, en son cercle. Or les Suffisances, note Lacan, « qu’ont-elles à faire de se parler? Se suffisant, elles n’ont rien à se dire, et dans le silence des petits Souliers elles n’ont personne à qui répondre[7]« .
Au terme, il y aura alors dans une telle institution « la dominance de la fonction du boss ou du caïd », à quoi tenteront de s’identifier tous les number one qui pullulent, précise Lacan, les « Et moi, et moi, et moi », ces Sans-Nom pressés chacun de s’auto-promouvoir, et qui sont autant de numéros deux. Quant à ladite formation, qu’y devient-elle ? « Un enseignement professionnel, conclut Lacan, (qui) comme tel, ne montre pas dans ses programmes de plan ni de visée qui dépasse ceux sans doute louables d’une école de dentistes[8]« .
Ainsi, dans un tel contexte institutionnel, la question de la formation se verra réduite à une logique de profession, à l’exemple précise t’il ici de ce que serait l’enseignement professionnel d’une école de dentistes. Pourquoi cet exemple ? Pour la raison je crois qu’un dentiste demande à ses patients d’ouvrir la bouche pour y farfouiller à l’intérieur, laissant alors son patient bien en peine de pouvoir dire un seul mot. Allongé sur un divan transformé en fauteuil de dentiste, ledit patient ne pourra que la boucler. La formation d’un enseignement professionnalisant est ainsi opposée par Lacan à la formation du psychanalyste. Plus encore, il critique ici l’organisation d’un tel enseignement professionnel, du type de celui que l’on pourra trouver aussi bien dans un parcours universitaire. La suffisance, le confort des positions moïques hiérarchiques, y ont trop de place. La suffisance ne devrait pourtant en avoir aucune dans les écoles de psychanalyse. Et c’est pourquoi au principe selon lequel un bon analysé ne pose pas de question, Lacan opposera l’éthique analysante, qui elle restitue la possibilité de la question.
Je poursuis alors sur cette question de l’éthique dans son articulation à la passe, à la formation, et aussi à la jeunesse. Il faut en effet souligner le rapport de la passe à la jeunesse, en précisant ce que nous entendons ici par jeunesse. Nous soulignons trop peu à quel point Lacan s’est intéressé à la jeunesse de son époque, comment il prit position non seulement pour tâcher d’accueillir et de répondre de sa place de psychanalyste aux questions que se posait cette jeunesse, mais comment il espérait en elle pour l’avenir de la psychanalyse. Son invention de la procédure de la passe était aussi destinée à cette jeunesse. Ainsi, confiait-il en 1972 à Milan lors d’une conférence, « Je suis très heureux d’y voir un très grand nombre de figures jeunes puisque c’est sur… enfin, c’est dans elles je veux dire, ces figures, que je mets mon espoir[9]. »
En somme, il me semble que le rapport de Lacan à la jeunesse, bien loin que de relever simplement de l’histoire, convoque finalement les questions les plus cruciales pour la psychanalyse, et nous éclaire à leur endroit. Je prends une première référence sur ce point, extraite de Télévision. « Heureux les cas où passe fictive pour formation inachevée », écrit Lacan, « ils laissent de l’espoir[10]« . La phrase, dans sa tournure même, est compliquée. Je me souviens toutefois que Guy Clastres me l’avait un jour citée. J’avais demandé ce jour là à le rencontrer, après avoir été informé que je n’étais pas nommé par le cartel de la passe qui avait entendu mon témoignage, et dont Guy Clastres faisait partie. Après un court échange, il m’avait alors cité cette phrase, en m’indiquant qu’il avait vu beaucoup de collègues que leur nomination d’AE, justement, avait achevé. Guy Clastres conclut à notre échange sur cette remarque : « Je vous laisse sur l’espoir ». Je m’en souviens encore aujourd’hui. Nous retrouvons quoiqu’il en soit dans cette phrase de Lacan l’articulation de la passe et de la formation. Lacan y fait entendre que le plus désespérant en psychanalyse, serait justement de penser la formation achevée. Le sujet se rabattera alors sur la position d’un moi fort, fort de son expérience, de son analyste, de son réseau, de son diplôme, de sa profession…
Nous voyons là déjà s’éclairer l’une des raisons pour laquelle dans la procédure de la passe, Lacan se méfiait de l’expérience, et la raison pour laquelle il choisit d’inventer la fonction de passeur. En effet, pour que passe l’authenticité d’un témoignage, Lacan relevait une double difficulté. Premièrement lors de la procédure de la passe, le sujet pourra toujours tordre son témoignage pour le mettre au pas des signifiants maîtres du moment. Difficulté connue, à laquelle Lacan en ajoute une autre, et qui concerne cette fois les cartels de la passe. L’Introduction à l’édition allemande des Ecrits y faisait déjà allusion, où Lacan estimait nécessaire de rappeler avec Freud qu’il n’y a d’analyse que du particulier, que chaque séance doit être considérée comme la première, et qu’en somme les « expériences ne sauraient s’additionner[11] ». Mais situant là une difficulté structurale, il y revint dans sa conférence à Genève, et cette fois explicitement au sujet des cartels de la passe. Ecouter un témoignage sans aussitôt le réduire à des connaissances déjà acquises, sans aussitôt le ranger dans un casier, voilà qui est chose « très difficile, nous dit-il, parce qu’évidemment le propre de l’expérience est de préparer un casier. Il nous est très difficile, à nous analystes, hommes ou femmes d’expérience de ne pas juger de ce cas en train de fonctionner, de ne pas nous souvenir à son propos des autres cas[12]. » « Il est clair que nous ne pouvons nous nettoyer de ce qui est notre expérience[13]. » C’est donc là un versant de l’expérience que Lacan n’oubliait pas[14], et contre quoi il aura pensé la fonction même de passeur, espérant que celui-ci serait un peu moins chargé de son expérience.
Ainsi, Lacan se méfiait d’une formation qui serait achevée. J’en prends un second exemple qui justement concerne la formation, et qui s’achèverait par la remise d’un diplôme… en poche comme l’on dit en France. Ainsi que le remarquait une collègue, Gwénaëlle Dartige, il serait en effet très intéressant de relever les curieuses expressions par lesquelles lalangue de tous les jours parle, décrit, et fantasme la formation achevée. J’extrais ce second exemple de la préface à sa revue Scilicet, que Lacan écrivit dans le contexte politique des événements de Mai 1968. Il y a donc un contexte politique très fort à ce texte, et notamment un contexte à l’université, qui était alors secouée par beaucoup de manifestations contre certains projets de réforme visant l’organisation et le statut des enseignements. A cela s’ajoutait au moment où paraît ce texte, un contexte politique au sein de la psychanalyse elle-même. Nous sommes là peu après la création de l’Ecole freudienne de Paris, que Lacan souhaite orienter à partir d’autres principes que ceux des Suffisances et des Petits souliers.
Dans ce texte, Lacan commence en effet par revenir sur sa critique des « psychanalystes d’aujourd’hui », dont il faisait la critique dès 1956. Il reproche tout d’abord aux psychanalystes d’avoir « fait défaut à dénoncer le défaut qui est au départ[15]« , autrement dit la castration. Nous savons alors comment la théorisation de l’objet oral était venue pour Bouvet et autres psychanalystes d’aujourd’hui permettre de boucher cette castration de départ, et de tout lire à partir de cette boussole de l’objet oral. Ainsi, poursuit Lacan, « C’est ce qu’elle fait (faire défaut à dénoncer le défaut) en le reportant au ratage d’un bien-être oral. » A quoi il ajoute : « Déviation à servir d’exemple pour le statut de l’idéologie, quand on sait de source observée la place de la digestion dans la morale professionnelle du psychanalyste[16]« . Ce passage est remarquable et enseignant à bien des égards, quant à la dérive de la psychanalyse vers une morale professionnelle.
Premièrement, refoulant la castration de départ, la psychanalyste dérive. Vers quoi ? Politiquement, vers une idéologie. A l’appui de la théorisation même de Bouvet, Lacan peut alors interpréter ce qu’est une idéologie. L’idéologie consiste à se nourrir des idéaux de l’Autre. Elle est à rapporter à la pulsion orale en psychanalyse. Se laisser convaincre et fasciner par une idéologie, consiste à ingurgiter les yeux fermés et la bouche ouverte le savoir de l’Autre, sur le principe de l’objet oral. Il s’agirait en somme de téter le lait au sein de la vérité. Raison pour laquelle Lacan invitera plutôt ses élèves à s’orienter à partir du réel qui lui consiste plutôt en un impossible, quelque chose d’indigérable. Le réel donc, et non la vérité à biberonner. Il précise : « Le réel et pas la vérité, car (…) c’est tentant, de sucer le lait de la vérité, mais c’est toxique. Ça endort, et c’est tout ce qu’on attend de vous[17]« . Ainsi, l’idéologie endort les masses, pour mieux les conduire. L’idéologie fonctionne par la digestion. Il s’agira de fournir aux foules de quoi se nourrir et s’abreuver: le bon objet d’une morale que l’on fait passer pour la vérité, et qui devrait valoir pour toutes et pour tous. Et pourquoi pas la morale professionnelle du psychanalyste, quand elle sera ainsi dévoyée de son éthique et de sa pratique, elle qui pourtant relève justement non d’un idéal professionnel, mais d’un désir. Tout l’enjeu de la passe sera donc de proposer autre chose que cette voie professionnalisante. Lacan ici nous avertit : il est possible de faire profession de la psychanalyse, qu’il s’agisse de la profession de foi, de l’idéal professionnel, ou bien encore de professer au nom de la psychanalyse, dans le discours universitaire. Dans le colloque type que promeut ce discours, il y aura toujours la longue digestion de début d’après-midi, voire plus si affinités.
A la morale de la profession, Lacan propose alors dans cette introduction à Scilicet de substituer un principe éthique qui puisse suffisamment réveiller ses jeunes lecteurs, psychanalystes à-venir : tu peux savoir, qui fait le sous titre et la traduction du titre de la revue, Scilicet. Nous y retrouverons notamment le tutoiement de la morale, que Lacan emprunte à l’impératif catégorique de Kant, mais pour le refonder à partir de la psychanalyse. De la morale, il s’agit de passer à l’éthique de la psychanalyse, laquelle se fonde d’un autre rapport au savoir. Voilà quelque chose de fondamental concernant la passe. Lacan va orienter tout son propos sur la jeunesse, de même que sa façon de s’adresser à elle dans le cadre de son enseignement ou de sa pratique analytique, à partir de cette question du savoir.
La formule Tu peux savoir, indexe et condense en effet tout son rapport à la jeunesse autant qu’à la passe, dans et pour une école de psychanalyse. Lacan y insistera ailleurs en des termes très clairs quelques années plus tard: « le moment dit de la jeunesse tient sa difficulté de la passe à prendre d’un savoir[18]« . Précisons alors de quelle façon Lacan va commencer à opérer cette bascule dans le rapport au savoir. Et pour cela, reprenons la formule, Tu peux savoir. En effet, qui vise ce tu auquel en appelle Lacan, auquel il s’adresse pour l’avenir de la psychanalyse ? Réponse : « Tu que je cherche, sache bien que j’ai ma part de rigolade. C’est pourquoi je décide de t’appeler: bachelier, pur te rappeler ta place dans cet empire du pédantisme (…). C’est ainsi que je suis moi-même alloué au baquet dit structuraliste, et qu’un des plus distingués de mes tenants, m’a averti: « Vous êtes maintenant au niveau du bachelier » (autrement dit : il veut du Lacan)[19]« . Ainsi, le tu concerne d’abord celui que Lacan décide d’appeler: bachelier.
Disant cela, Lacan précise qu’il le dit non sans sa part de rigolade. Nous voici revenus au ton de la fable. Ici comme ailleurs, Lacan s’amuse, jouant avance les mots, mais pour faire passer une thèse précise et sérieuse. Pour l’isoler, suivons de près le texte. Il y a ce « Tu que je cherche », de même qu’il ajoute un peu plus loin: « C’est pourquoi je décide de t’appeler : bachelier », les deux petits points venant ici marquer une coupure, et rendant la phrase équivoque. Il y a donc ici une adresse et un appel au bachelier. Seulement, de quel ordre ? Premièrement, le fait qu’il décide d’appeler son lecteur bachelier, nous indique qu’il n’y a rien ici d’automatique. Il n’appelle pas seulement son lecteur bachelier en raison de son âge, mais décide de l’appeler ainsi. Il y a dans l’utilisation de ce terme une vraie décision, et pour quelle visée? La suite nous l’indique. Je cite à nouveau : « je décide de t’appeler: bachelier, pour te rappeler ta place dans cet empire du pédantisme ». Or qu’est-ce que le pédantisme ? Une modalité de la suffisance, à laquelle nous revenons donc. Précisons : le pédantisme, devenu en notre modernité un empire, est une façon de faire étalage de son savoir. Et de quoi fait-on étalage, si ce n’est des produits du marché ? L’empire du pédantisme est donc une façon de désigner la marchandisation du savoir à quoi conduit le capitalisme, couplé au discours universitaire.
Ainsi, Lacan décide d’appeler son lecteur bachelier pour l’inviter premièrement à mesurer à quelle place l’attend et voudrait le fixer le discours capitaliste, et dans quel type de rapport au savoir ce discours voudrait l’orienter. Et en effet, il est patent qu’aujourd’hui la jeunesse est beaucoup considérée à partir du rapport à un certain type de savoir. Cela ne fut pas toujours le cas dans l’histoire. Il n’a pas toujours été fait place à la jeunesse à partir uniquement des critères du savoir, tel que le monde contemporain les impose. Je ne parle pas ici en effet du savoir de l’inconscient, mais bien du savoir tel que le promeut le discours de notre modernité, c’est à dire le savoir au sens des diplômes, des compétences professionnelles, le savoir que l’on déposera ensuite dans un Curriculum Vitae pour postuler à telle ou telle offre d’emploi, pour avoir une place. Le bachelier est donc celui qui aura passé son diplôme, et celui qui une fois sa formation achevée, pourra aller « se vendre » sur le marché de l’emploi, ainsi que la modernité l’y pousse et l’y contraint.
Lacan fait donc ici allusion au marché du savoir que constitue le capitalisme, et à quoi justement les événements de Mai 1968 tentaient à l’époque de s’opposer. Il y reviendra quelque années plus tard en 1970, à un moment où il s’adresse à des étudiants, dont la plus part étaient alors engagés dans des mouvements révolutionnaires, et notamment au moment où une réforme de l’université était en train de passer. Cette réforme de l’université avait alors pour objet l’orientation des étudiants, et se destinait à mettre en place ce qui continue d’exister aujourd’hui : des unités de valeurs. Or que leur dit Lacan ? « Cette réforme de l’Université a ceci, qu’elle met au clair ce dont il s’agit. Dans l’Université, il y avait, comme on dit, un malaise, un malaise dû à quelque chose qui est de l’ordre d’une singulière bascule sociale. Par exemple, je mets les choses au clair, elle dit que ce dont il s’agit, quant à cette troupe qu’on se charge, dans l’enseignement supérieur, de former — alors qu’il est dix fois trop tard, vous comprenez ! Quand on est dans l’enseignement supérieur, on n’a plus à être formé, on est plus qu’archi-formé… Comme objets, vous êtes des unités de valeur. C’est là le point sur lequel j’aurais voulu avancer pour vous quelques propos aujourd’hui. En d’autres termes, j’aurais voulu essayer de vous … désorienter[20]. » Je souligne la fin de ce passage. Au moment où l’Université voudrait dans son projet d’orientation créer ces unités de valeur et finalement y réduire le statut même des étudiants, Lacan propose de les dés-orienter. Il s’agira ici de les désorienter de cette voie où le premier critère retenu et voulu serait de réduire l’étudiant et le savoir lui-même à une « unité de valeur », et donc à une valeur marchande. Lacan leur souligne ainsi le risque qu’ils se laissent bercer et conduire par ce discours, où ils ne seront plus qu’un « objet d’espoir ». Objet, « archi-formé[21]« .
En ce cas, chacun d’eux ne manquera pas alors d’aller rejoindre cet empire du pédantisme, et son fantasme vain de Maîtrise du savoir, du nom même de ce diplôme français par lequel après avoir passé ses unités de valeurs, on termine son parcours universitaire, avant que de rejoindre, diplôme en poche, les professionnels de la profession. Ainsi, dira Lacan cette fois dans son séminaire L’envers de la psychanalyse : « Tous, unités de valeur – à avoir dans votre giberne le bâton de culture, maréchal en diable, plus des médailles, comme dans les comices à bestiaux, qui vous épingleront de ce qu’on ose appeler maîtrise[22]« . Soulignons au passage comment l’idéologie, ici capitaliste, entend aussi séduire les foules à partir du narcissisme. Chacun pourra se satisfaire de se conformer à la demande de l’Autre, attendant en retour sa petite médaille pour son moi fort. Nous retrouvons ici le rapport entre un certain savoir, et la suffisance.
De cela, Lacan entend donc dés-orienter ses jeunes élèves. Dans son séminaire L’envers de la psychanalyse, il en appellera même à un peu de honte, qui puisse les réveiller et les faire sortir de leur « air éventé[23]« , autre façon de faire allusion à cette suffisance narcissique que produit le marché. Lacan, en effet, aura toujours situé le moi fort à partir du discours capitaliste, et y compris la place de ce moi fort dans le champ de la psychanalyse elle-même. Il y a donc là un point très important. En quoi le discours capitaliste peut-il influencer la théorisation de la fin de la psychanalyse ? Nous avons pour habitude de critiquer, et à juste titre, l’identification au moi de l’analyste. Mais nous pourrions nous demander si certaines théorisations de la fin de l’analyse, se voulant lacaniennes, n’en sont pas d’autres versions, mises au goût du jour. Il se pourrait en effet très bien qu’il y ait aujourd’hui une, des, versions soit-disant lacaniennes du moi fort. L’invention par Lacan de la procédure de la passe, visant justement à autre chose qu’un moi fort, est donc à situer non seulement à partir du discours de la psychanalyse, mais aussi du discours capitaliste. Dans la version orale de Télévision[24], nous en avons d’ailleurs l’indication très claire de Lacan. Commentant la sortie du discours capitaliste, il ajoute que ça ne « constituera pas un progrès si ça ne se passe que pour certains ».
A cet égard d’ailleurs, Lacan n’ignorait pas non plus le risque que son propre enseignement soit ainsi repris par le discours universitaire et capitaliste. Au vu de ce qui précède, il faudrait même dire : digéré. Il l’indique dans cette introduction. « Vous êtes maintenant au niveau du bachelier », lui a t’on dit. Il traduit : « Il veut du Lacan[25]« . Ainsi que me l’a indiqué une collègue Fanny Reguer, il faut souligner ce du... Lacan. Le du vient dire un Lacan qui serait consommé, au même titre que n’importe quel objet de consommation. De même, disant pourquoi il ne voulait pas, sous prétexte de faire une conférence en province, tomber dans une simplification condescendante, il précisait : « Je ne pense pas vous livrer mon enseignement sous la forme d’un comprimé, ça me parait difficile. On fera peut-être ça plus tard, c’est toujours comme ça que ça finit. Quand vous êtes disparu depuis suffisamment de temps, vous vous résumez en trois lignes dans les manuels[26] » Un comprimé n’est-il pas en effet quelque chose qui peut s’avaler et se digérer en une dose, unique? Nous voici donc revenu à la digestion, à laquelle se refusait Lacan, mais dont il devinait qu’elle le menaçait tant l’extension du marché n’a de limites, et fait profit, marchandise, de tout. Il poursuit : « Quand vous êtes disparu depuis suffisamment de temps, vous vous résumez en trois lignes dans les manuels – en ce qui me concerne, manuels on ne sait d’ailleurs pas de quoi. Je ne peux prévoir dans quels manuels je serai inséré pour la raison que je ne prévois rien de l’avenir de ce à quoi se rapporte mon enseignement, c’est à dire la psychanalyse. Je souhaite, moi, qu’elle devienne quelque chose [27]».
Et c’est pourquoi il proposera en effet un autre rapport au savoir. Pour celui-ci, il ne s’agira donc pas de se donner des airs d’intelligence, tant ce serait retomber sur une version du moi fort. Je l’indiquais plus haut : nous pourrions très bien inventer une version lacanienne du moi fort, et même se gonfler le torse en se disant lacanien. Là aussi, Lacan n’en était dupe d’aucune façon. Sachant même que cela arriverait, il tint à rappeler en quoi la psychanalyse consiste en un autre rapport au savoir, et que pour cette raison, elle ne pouvait entendre l’intelligence de la même façon. « Dans vingt ans,… tout le monde sera lacanien, c’est-à-dire aussi bête qu’avant, n’est-ce pas ? C’est pas parce qu’on dira les choses que je dis, que ça rendra plus intelligent, puisque inter ligere c’est savoir lire les choses au niveau de ce qu’on entend, au niveau de ce qui se dit, au niveau des faits, parce qu’il n’y a pas d’autre fait que ce qui se dit : ça c’est savoir lire.[28] »
Etre lacanien relèverait ainsi d’une identité moïque de plus, quand Lacan fait ici passer en quoi la psychanalyse, pratique et théorique, s’appuie sur un désir de lecture. Et c’est pourquoi il voulait son style si affine au style de l’inconscient, énigmatique et surprenant. Une façon aussi de tout faire pour empêcher que l’on puisse le lire en diagonale, et pour déranger, comme le fait l’inconscient lui-même, cette lecture consommatrice, celle dont le discours capitaliste aura fait son marché en créant des digest.
De là, je reviens alors à l’introduction de Scilicet, où Lacan propose très logiquement à son lecteur de passer de la position de bachelier à celle de bachelor. Plus précisément, s’adressant à celui qu’il a d’abord décidé de nommer bachelier, il écrit: « Il reste ceci de préservé que ton nom cache bachelor ». A quoi il ajoute : « Du moins sache que je l’y suppose[29]« . Autrement dit, Lacan suppose à son lecteur que reste en lui préservé cette position de bachelor, à partir de laquelle ledit bachelier pourra décider, ou non, de s’orienter. Dans ce jeu avec les mots, passe ainsi une thèse précise. Le terme de bachelor, précise en effet Lacan, signifie en anglais non encore marié. Au regard de ce qui précède, nous pouvons en déduire que le bachelor, pour Lacan, vient désigner celui qui n’est pas encore marié… avec la théorie, avec telle ou telle idéologie, avec tel ou tel savoir prêt-à-consommer. En cela, il est aussi celui qui pourrait avoir avec lui la fraîcheur de l’étonnement et du questionnement. Le bachelor est en effet celui qui, non encore marié, n’est pas « obligé de soutenir de la révérence due aux mérites d’une personne[30]« . Il est celui qui, ne s’étant pas encore de trop aliéné à tel ou tel savoir prêt-à-penser, n’est pas encore entré dans cette servitude volontaire que promeut le discours du maître. Il y a donc pour la psychanalyse une irrévérence salutaire. Je rappelle ma citation du début. Il faut « le culot monstre de l’enfant, énonce Lacan, pour dire que le Roi est nu, pour en faire la remarque » Et d’ailleurs, n’est-il pas souvent reproché à la jeunesse, justement, son irrévérence ?
Ainsi, Lacan souligne l’intérêt de cette position du bachelor, en ce que celle-ci marque le fait que le sujet n’est pas déjà converti à un savoir préformaté. Et c’est pourquoi dira t’il, je cite à nouveau : « Heureux » sont ceux qui sont en « formation inachevée: ils laissent de l’espoir[31]« . J’y reviens en effet pour préciser au terme de ce parcours ce non achèvement de la formation, et en quoi la passe y répond justement. Sur le fond, pourquoi cet inachèvement ? A partir de ce qui précède, nous voyons qu’il ne s’agit évidemment pas d’une question d’âge. Ce qui dans la jeunesse retient Lacan, est la possibilité d’un certain type de savoir, qui fasse place à une limite, et qui la reconnaisse. Or qu’est-ce que cette limite, sinon celle de la castration ? Nous savons ses conséquences. La limite de la castration viendra limiter le savoir dans la mesure où aucune connaissance ne permettra de fonder le rapport sexuel. D’où le choix si malicieux par Lacan de ce terme de bachelor. Pas encore marié, viendra aussi convoquer cette dimension du non rapport sexuel, que la jeunesse vérifie toujours. De plus, Pas encore marié dira aussi que le bachelor en question n’aura pas cherché à déjà clore sa question en ayant recours à la connaissance.
Lacan y aura souvent insisté, la connaissance, ce rêve de savoir, est toujours et depuis son origine une tentative de suppléance au non rapport sexuel. Le terme de Bachelor condense ainsi ces deux dimensions, faisant le savoir, manquant. Pour la psychanalyse, il ne pouvait donc y avoir de formation achevée. L’enjeu sera plutôt qu’il puisse y avoir un savoir sur cette limite même. Sur le plan théorique d’une part, mais aussi au un par un des sujets, quand ils désireront aussi déchiffrer comment leur inconscient, ce savoir sans sujet, sera déjà venu y répondre. Tu peux savoir donc. Ce que Lacan reprendra d’ailleurs dans Télévision. Tu dois savoir le destin que te fait l’inconscient. Tu peux savoir, sera donc l’offre de ce passage, de cette passe à un autre savoir, à l’exemple de cette bascule de discours que Lacan opère entre le bachelier et le bachelor. En cela, la passe viendra répondre à ce point précis, où toute formation ne sera qu’inachevée. Car là, en ce lieu même de la limite, le sujet aura chance de passer. Hëidegger avait déjà indiqué comment la limite n’est pas seulement ce qui fait cesser quelque chose, mais qu’elle est surtout, savaient les grecs, ce à partir de quoi quelque chose peut advenir. Et pourquoi pas en un éclair en effet, autre thème cher à Heidegger. Quoiqu’il en soit, comment préciser ce passage ? Je prendrai, au regard de ce qui précède et s’agissant notamment de la question de la formation et de la jeunesse, un autre exemple.
Je l’extrais de Télévision. Dans ce dialogue, un jeune philosophe d’une vingtaine d’années, Jacques-Alain Miller, adresse notamment à Lacan les trois questions kantiennes, que nous pouvons aussi lire comme paradigmatiques de la jeunesse, non seulement de l’époque, mais d’aujourd’hui. Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer ? Lacan accueillera ces questions, n’y opposant pas bouche pincée, mais y répondant à partir de la psychanalyse. Voire, de sa place de psychanalyste, sachant aussi quel effet de transfert soutenait l’adresse de ces questions. Je m’arrête sur la troisième de ces questions. A celui qui lui demandait, au nom de Toute la jeunesse, Que m’est-il permis d’espérer?, Lacan lui retourne la question, comme il le ferait pour chacun, la reformulant ainsi : « d’où vous espérez ?[32] » Et lui faisant ainsi, l’offre de la psychanalyse elle-même, qui seule permet de passer de la demande à l’Autre de l’objet, laquelle conditionne et nourrit la suggestion, l’obéissance, et le symptôme, à l’objet cause du désir, qui « lui n’est déductible qu’à la mesure de la psychanalyse de chacun[33]« .
Je conclus sur la singularité de ce lieu, de ce point que constitue ce D’où vous espérez ? Signe que pour la jeunesse aussi, Lacan en appelait, contre l’égarement, au devoir éthique de se situer, de s’y retrouver. Il y a donc bien un espace, éthique, de l’école, qui serait à préciser en fonction de cette éthique psychanalytique, de ce devoir de « s’y retrouver » dans la structure. J’en conclus que ce passage de « Que m’est-il permis d’espérer », à la question « D’où vous espérez », est affine à la passe que proposait Lacan. La passe se tient en ce lieu, ce « D’où », où Lacan invitait au déchiffrage de la cause d’un désir, qui permette de sortir de l’égarement moderne. Il se pourra alors qu’en ce lieu, un sujet en vienne à déchiffrer le désir qui le conduisit à se proposer à la pratique psychanalytique. Voilà qui alors ne pourra se déchiffrer qu’au un par un, à l’inverse précisément de toute formation professionnelle.
En somme, il se déduit au terme de ce parcours que non seulement toute formation est inachevée, mais que surtout, disait Lacan, « Il n’y a pas de formation analytique » « Je n’ai jamais parlé de formation analytique. J’ai parlé de formations de l’inconscient[34]« . Il n’y a pas de formation analytique professionalisante, sans quoi ce serait retomber sur le discours du maître, celui du « magister », de la « maîtrise, » du « Master », et de tous les écrans que ces velléités de maîtrise constituent. Le maître n’est pas seulement celui qui oriente, « Circulez!, » Il est celui qui impose vitesse et accélération pour que ça marche « comme sur des roulettes », et que ce faisant, rien ne se sache du réel de la castration. Le maître moderne ne dit pas seulement « Circulez! », mais « Circulez! Y’a rien à voir ». Pas étonnant dès lors que l’on ait reproché depuis toujours à la psychanalyse sa durée nécessaire pour déchiffrer ce qui dans le réel, objecte à cette course forcée. Or en ce lieu en effet il n’y a pas de formation, il n’y a que « des formations de l’inconscient », desquelles il est possible de déchiffrer quelque chose. Et quoi donc, sinon l’impossible dont elles faisaient signe. « L’analyse, précise Lacan, est en somme la réduction de l’initiation à sa réalité, c’est à dire au fait qu’à proprement parler, il n’y a pas d’initiation »[35]. Qu’un sujet puisse alors désirer se proposer comme analyste et permettre ainsi à d’autres d’en faire l’expérience, voilà ce dont il pourra témoigner. Comment sera t’il passer à ce désir ? Ainsi, au parcours professionnel dont nos modernes CV, versions de nos moi forts d’aujourd’hui, voudrait vanter et vendre les mérites, s’oppose cette passe, qui elle sera logiquement, toujours inédite.
[1] Lacan J., « Situation de la psychanalyse en 1956 », in Ecrits, Paris, Seuil, 1966.
[2] Ibid., p.475.
[3] Ibidem.
[4] Ibid., p.476.
[5] Ibid., p.477.
[6] Ibidem.
[7] Ibidem.
[8] Ibid., p.457.
[9] Lacan J., « Discours de Jacques Lacan à l’Université de Milan le 12 mai 1972 », paru dans l’ouvrage bilingue : Lacan in Italia 1953-1978. En Italie Lacan, Milan, La Salamandra, 1978, p.32-55. Consultable sur internet.
[10] Lacan J., « Télévision », in Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p.510.
[11] Lacan J., « Introduction à l’édition allemande des Écrits », in Autres écrits, op. cit., p.556.
[12] Lacan J., « Conférence à Genève sur le symptôme », 1975, inédit, consultable sur internet.
[13] Il poursuit : « Freud insiste beaucoup là-dessus, et si c’était compris, cela donnerait peut-être la voie vers un tout autre mode d’intervention – mais ça ne peut pas l’être », in Lacan J., « Conférence à Genève sur le symptôme », op. cit.
[14] Y compris pour lui-même. Cf Lacan J., Le Séminaire Livre XXII, RSI, Leçon du 15/04/1975, in Ornicar ? n°5, 1975/1976.
[15] Lacan J., « Introduction de Scilicet », in Autres écrits, op. cit., p.284.
[16] Ibidem.
[17] Lacan J., Le Séminaire Livre XVII, L’envers de la psychanalyse, Paris, Seuil, 1991, p.212.
[18] Lacan J. « Discours de conclusion au Congrès de l’École Freudienne de Paris sur La technique psychanalytique », Lettres de l’École freudienne, n° 9, 1972, p. 513.
[19] Lacan J., « Introduction de Scilicet », in Autres écrits, op. cit., p.284.
[20] Lacan J., « Impromptu n°2, Vincennes, 3 Juin 1970 », paru dans la version réalisée par l’Association Lacanienne Internationale, du Séminaire de Jacques Lacan, L’envers de la psychanalyse.
[21] Ibidem.
[22] Lacan J., Le Séminaire Livre XVII, L’envers de la psychanalyse, Paris, Seuil, 1991, p.212.
[23] Ibid., p.211.
[24] Consultable sur internet
[25] Lacan J., « Introduction de Scilicet », in Autres écrits, op. cit., p.284.
[26] Lacan J., « Place, origine et fin de mon enseignement », in Mon enseignement, Paris, Seuil, 2005, p.11.
[27] Ibidem.
[28] Conférence donnée au Centre culturel français le 30 mars 1974, suivie d’une série de questions préparées à l’avance, en vue de cette discussion, et datées du 25 mars 1974. Parue dans l’ouvrage bilingue : Lacan in Italia 1953-1978. En Italie Lacan, Milan, La Salamandra, 1978, p.104-147.
[29] Lacan J., « Introduction de Scilicet », in Autres écrits, op. cit., p.284.
[30] Ibidem.
[31] Lacan J., « Télévision », in Autres écrits, op. cit., p.510.
[32] Ibid., p.543.
[33] Lacan J., « Radiophonie », in Autres écrits, op. cit., p.414.
[34] Lacan J., « Intervention au Congrès de l’Ecole freudienne de Paris, à la Grande Motte », 1973, inédit, consultable sur internet.
[35] Lacan J., Le Séminaire Livre XXIII, Le sinthome, Paris, Seuil, 2005, p.30.